Bilbao_et_sa_petite_prot_g_e_Ganja

Je porte le nom d’une ville d’Espagne, mais je n’y suis pas né. J’ai vu le jour en Guadeloupe, en Avril 2012, je crois. J’ai été trouvé au bord de la route à Sainte Anne, dans le quartier Poirier de Gissac, pour ceux qui connaissent. Je devais avoir tout au plus un an et demi.

Je portais une cordelette blanche au cou et un mousqueton y était accroché. J’ai dû vivre attaché mais il y a si longtemps que je ne m’en souviens plus. Je ne garde en mémoire que les bons souvenirs, les vilains je les enfouis bien loin.

Il me manque un petit bout de queue aussi.

J’ai été sécurisé dans une charmante famille qui a bien pris soin de moi et m’a apporté beaucoup de tendresse. Je m’entendais bien avec les enfants, les chiens et les chats. J’étais très obéissant. J’avais reçu une éducation car je répondais bien quand on me disait « viens ici ».

Ma protectrice m’a expliqué, un jour, qu’elle accueillait des petits malheureux comme moi, provisoirement seulement. Elle a ajouté que beaucoup d’autres attendaient dans la rue et que j’allais traverser l’océan pour trouver un vrai foyer en métropole.

Et, effectivement, je suis parti quelques temps après, en région parisienne. Je ne me suis pas retrouvé tout de suite dans une maison mais dans un refuge.

C’était au mois d’Avril, il ne faisait pas aussi chaud qu’en Guadeloupe mais c’était supportable. Je ne comprenais pas trop tous ces bouleversements, j’étais, comme on dit, déboussolé.

Je ne savais pas alors que, non loin de moi, une dame souhaitant adopter un chien, regardait avec son fils le site internet du refuge.

Elle m’a dit plus tard, qu’en découvrant ma photo ils avaient eu un véritable coup de foudre. Mon regard parlait par lui-même.

Ils décidèrent de venir me rencontrer. Mais la chance n’était pas avec nous ce jour-là, j’avais attrapé la vilaine toux du chenil et j’étais à l’infirmerie. Après avoir fait un tour dans le refuge sur le conseil du personnel ils insistèrent pour me voir MOI. J’aboyais dans mon box, il y avait un chien en face de moi, qui venait de Guadeloupe également. Manifestement je n’appréciais pas la présence d’un autre congénère, même créole. Mais cela ne semblait pas les décourager.

Le fait que la famille vive en appartement paraissait être un obstacle à mon adoption. Je me résignai à attendre donc. De toute façon, j’étais malade, je ne pouvais pas partir.

J’ai appris ensuite que la dame prenait régulièrement de mes nouvelles. Cela m’a donné un peu d’espoir.

Et elle est revenue, je l’ai entendue expliquer au personnel du refuge qu’elle habitait à côté d’une grande forêt, que je pourrais me dépenser et que chaque week-end elle m’emmènerait faire de longues balades.

Et ce fut gagné !! Je suis parti le jour de la fête du muguet dans ma nouvelle famille. Les humains disent que cette petite fleur porte bonheur, je les crois !!

Ma maîtresse n’allait pas très bien avant mon arrivée, elle venait de vivre un douloureux événement et ma présence l’a aidée à remonter la pente.

Je ressentais sa tristesse et je me suis rapprochée d’elle, une véritable complicité est née entre nous deux. Depuis nous sommes inséparables. On ne se quitte jamais, elle m’emmène partout où elle va.

J’ai découvert les mers de métropole. D’abord la Manche, en Basse Normandie. La plage y est immense, bien plus grande que celles de Guadeloupe. Puis j’ai traversé la France pour aller voir la Méditerranée, dans le Var. Je retrouvais des paysages un peu plus proches de ceux que j’avais laissés sur mon île.

J’étais tellement heureux de me dépenser au soleil avec ma maîtresse à mes côtés.

Mais avec elle je serais même allé au pôle Nord où il fait très froid, parait-il. Je la suivrais jusqu’au bout du monde.

Quand elle est malade je me couche à ses côtés pour la protéger du mal, pour lui dire de ne pas s’inquiéter que je veille sur elle. Je sais qu’elle comprend et que cela la réconforte.

Elle dit qu’elle veut que nous soyons réunis pour l’éternité quand nous ne serons plus de ce monde. Mais je ne veux pas y penser. Je suis si heureux près d’elle aujourd’hui.

Je vous parle beaucoup de ma maîtresse mais nous ne vivons pas seuls.

Il y a le petit garçon, il craignait un peu les gros chiens mais avec moi il a vaincu sa peur, vu que je suis un gros nounours tout doux.

Depuis que je suis arrivé, il s’investit beaucoup dans la protection animale, prenant exemple sur sa maman. Il l’accompagne quand elle va accueillir des créoles à l’aéroport d’Orly. Il œuvre aussi au sein de son collège.

Je vais lui souhaiter bonne nuit avec ma maîtresse chaque soir dans sa chambre.

Et il y a l’homme de la maison. Lui, il a dû s’adapter. Il vivait en Guadeloupe, comme moi. Et là-bas les chiens restent plus fréquemment dehors. Ils ne doivent pas monter sur le canapé ni être près de la table lors des repas. Mais je l’ai très vite conquis. Vous n’imaginez pas le pouvoir que nous avons sur les humains.

Maintenant, quand il rentre de son travail, il me fait des câlins. C’est lui qui laisse toujours un petit quelque chose pour moi à manger. Si je traîne pour aller me coucher c’est lui qui m’appelle.

Au début je crois même qu’il se cachait pour ne pas montrer qu’il avait de l’affection pour moi mais désormais il la manifeste au grand jour pour mon plus grand plaisir.

La mamie qui ne vit pas très loin m’aime beaucoup aussi. Elle qui ne voulait pas de chien chez elle me garde les matins quand ma maîtresse va travailler. Elle propose même de me garder quand arrivent des chiots à la maison pour que je sois plus tranquille. Oui, j’ai oublié de vous dire que ma maîtresse est famille d’accueil de créoles.

Et, enfin, il y a la petite chienne Ganja. Elle est arrivée de Marie Galante, une île de l’archipel guadeloupéen, en transit, en attendant de trouver un foyer définitif.

Au début je lui montrais les crocs et lui grognais dessus. Je ne voulais rien partager avec cette intruse. Mais mon maître a décidé de la garder. Je m’y suis donc habitué et maintenant je m’occupe d’elle comme un grand frère. On dort ensemble et les matins je lui fais sa toilette, je lui lave les oreilles, les yeux à grand renfort de léchouilles.

Je suis très protecteur avec elle mais il arrive qu’on fasse des bêtises ensemble aussi comme deux jeunes enfants. Par exemple, quand elle est trop petite pour attraper quelque chose d’attirant sur la table, je le fais tomber et on se régale à deux.

Il faut que je vous parle aussi d’une jeune enfant qui vient passer ses vacances à la maison. Elle vit en Guadeloupe. Elle a été habituée à voir les chiens enchaînés au fond des jardins, qui ne mangent que lorsqu’il y a des restes de repas. Il y en avait un chez elle. Depuis qu’elle avait vu mes conditions de vie ici, elle allait le nourrir régulièrement. Un jour, ayant constaté qu’il avait une blessure infectée à force de tirer sur sa chaîne, elle a appelé ma maîtresse pour savoir quoi faire et l’a soigné bravant les moqueries de ses frères et sœurs.

Elle a beaucoup souffert quand sa mère a déménagé en laissant le chien sur place mais elle était trop petite pour oser dire quelque chose.

J’espère qu’il y aura de plus en plus d’enfants comme elle sur mon île. Il y a tellement de misère animale.

C’est pour cela que je vous raconte mon histoire, faites la passer aux enfants autour de vous pour que tous les animaux vivent enfin heureux avec leurs maîtres, en bonne intelligence, respectés et aimés comme ils le méritent.

Que tous puissent partager comme moi un immense amour avec leur famille.

Ecrit par Mabel et Lise

Bilbao et sa petite protégée Ganja

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