Banjul … beau témoignage d’amour entre deux sœurs et entre une chienne et son papa

Banjul

                           

Mon histoire commence par un début de vie difficile. Ma sœur et moi, avons été abandonnées toutes petites sur un parking. C’était celui du centre commercial Milénis aux Abymes, en Guadeloupe. Nous nous sommes retrouvées à vadrouiller entre voitures et poubelles. Eh oui, probablement jetées par ceux qui nous servaient de maîtres en allant faire leurs courses. Ils espéraient peut être que de bonnes âmes nous viendraient en aide.

Mais les seules personnes qui faisaient attention à nous, ne nous voulaient pas de bien. J’en ai d’ailleurs gardé des séquelles.

Heureusement, un jour quelqu'un réalisant que nous étions en grand danger nous signala aux bénévoles de la protection animale.

Et là, une grande chaine de solidarité s'est mise en place. Des petites fées, comme mon papa les appelle, se sont relayées pendant des jours et des jours pour tenter de nous capturer. Les humains n’avaient pas été tendres avec nous jusque- là et nous ne laissions personne nous approcher. La peur était la plus forte même si ces gentilles dames nous déposaient à manger.

 

Puis vint le jour appelé MISSION COMMANDO par les sauveuses, c'était décidé, elles ne repartiraient pas sans nous ! Nous étions trop en danger, le temps était compté !

L’équipe de petites fées était venue au complet !

J’ai été attrapée ce jour-là mais ma sœur, prise de panique, s’est enfuie. Je me retrouvai perdue sans elle et très inquiète. Cela n’a pas duré longtemps, dès le lendemain matin, elle a pu être sauvée elle aussi. Un monsieur l’avait bloquée près des poubelles pour faciliter sa capture. Un grand merci à lui aussi. Si elle avait su ce qui l’attendait, la coquine, elle aurait opposé moins de résistance.

Nous nous sommes retrouvées chez le vétérinaire. Il pouvait nous faire tout ce qu’il voulait, j’étais à nouveau avec ma sœur et cela seul comptait.  Elle avait toujours été là pour me protéger donc rien de vilain ne pouvait m’arriver. J’espérais juste ne plus être séparée d’elle.

Nous écoutions ce qu’il se disait autour de nous, et des mots revenaient souvent : rester à la clinique, adoption, vol, avion, métropole, préparatifs, papiers. Ces termes n’avaient aucune résonnance pour nous.

C’est alors que nous avons été appelées Banjul et Bakou. Ce sont les noms de deux capitales !

Il faut de l’imagination aux dames qui sauvent des animaux !!

Allez un peu de Géographie !

Je vous aide, Banjul est la capitale de la Gambie et Bakou celle de l’Azerbaïdjan.

Et voilà, moins de 48 h après notre kidnapping nous sommes parties pour un grand et long voyage. C’était au début du mois de Mars 2015.

Bakou et moi, oui je m’habituai à l’appeler Bakou, avions très peur en embarquant dans le grand oiseau blanc. Nous restions collées l’une à l’autre pour mieux affronter l’inconnu.

Après de longues heures qui nous ont parues interminables, nous sommes arrivées en métropole et là je dois vous dire qu’il y faisait très froid !!

Nos douces fées nous avaient prévenues mais les mots ne signifiaient pas grand-chose pour deux créoles qui ne connaissaient pas les basses températures.

Elles nous avaient dit aussi que nous allions avoir toutes les chances de goûter au bonheur, de connaître ici l’amour d’une famille. Mais tout ceci n’évoquait rien pour nous.

Nous restions cependant confiantes, nos sauveuses n’avaient eu que des gestes attentionnés pour nous et nous avaient manifesté tellement de tendresse. Pourquoi douter ?

Après la descente d’avion, notre voyage n’était pas terminé, nous avons fait un grand trajet en voiture avant d’arriver au refuge, près de Metz dans l’Est de la France. Là, il faisait à peine 8 degrés au thermomètre !!

Nos débuts en métropole n’ont pas été évidents. Nous avons réalisé que nous allions rester jour et nuit dans une cage froide et triste.

Le personnel du refuge prenait bien soin de nous, il nous avait mis des couvertures et tentait de nous faire des câlins.

J’ai une petite pensée pour une bénévole qui s’appelle Mélissa. Je mangeais les lacets de ses souliers quand elle venait me voir. Je n’en avais pas beaucoup côtoyé, en Guadeloupe, des dames avec des chaussures à lacets alors ça m’amusait. Mais je ne me laissais pas pour autant attraper.

Au fil des jours, des personnes nous rendaient visite. Ma sœur et moi commencions à réaliser que nous pourrions être séparées, peut-être à jamais ?

Je ne pouvais me résoudre à cette idée et me blottissais contre elle.

Et effectivement, un jour une douce dame s’est renseignée sur nous. Elle a appris que j’étais déjà réservée … je ne le savais pas  … et décida donc d’adopter Bakou.

Ce fut un réel déchirement de voir partir ma sœur chérie.

Quelques heures plus tard je quittai mon box à mon tour ! Je venais de trouver ma famille !

Mais je ne me suis pas sentie bien avec mes nouveaux maîtres. Ils n’avaient pas le temps de travailler sur mon comportement. J’avais des séquelles de mon passé vous le savez.

Alors peu de temps après ils m’ont ramenée comme un vulgaire paquet.

Plus personne ne pouvait désormais m’approcher … même pas les gens du refuge !

Un monsieur avait fait partie des visiteurs dont je vous ai parlé plus haut.

Je ne savais pas qu’il s’était renseigné sur moi, il avait eu la même réponse que l’adoptante de Bakou : déjà réservée.

Et un jour, il est revenu faire un tour, s’est arrêté surpris devant moi et m’a dit  « mais Banjul que fais-tu là ma belle gueule d’amour ? ».

Et moi, si craintive, je suis passée outre mes peurs, mon petit cœur s’est mis à battre vite tout à coup. Cet homme me regardait et là j’ai compris ce que les fées voulaient dire par connaître l’amour. Son regard en était rempli. Pour la première fois j’ai senti que mon destin pouvait basculer.  

Pourtant je l’ai vu repartir, en fait il était parti se renseigner sur mon retour. J’ai eu très peur qu’il ne revienne pas après ce qu’il allait entendre.  

C’était mal le connaître. Après de longues minutes, il est revenu avec une bénévole et a demandé qu’elle ouvre ma cage.

Elle l’a fait en précisant : « elle est très gentille mais timide, je ne pense pas que vous allez réussir à la caresser ».

Contre toute attente je me suis lancée comme une folle dans les bras de ce monsieur, je lui ai fait plein de léchouilles et de câlins. J’avais compris à son regard que ce serait lui mon papa ! Pour la première fois je me suis sentie apaisée.

Mais la dame m’a remise dans le box en prenant soin de le refermer.

Pour une fois que je commençais à toucher le bonheur du bout de ma truffe, pourquoi m’était-il interdit ?

Sentant mon désespoir le charmant homme m’a fait de grands signes et envoyé plein de bisous en partant.

J’étais triste et suis partie me réfugier au fond de mon box pour ne plus rien voir.

Une bonne heure plus tard, je l’ai vu revenir avec plein de choses, laisse, collier, doudous, balles. Tout cela serait-il pour moi ?

Eh oui, je suis sortie par une porte inhabituelle du box, la dame m’a mis un magnifique collier autour du cou et attachée à une laisse assortie. Elle m’a dit : «  Viens ma fille, tu vas voir, tu vas être heureuse et gâtée avec ton nouveau maître, j’en suis certaine, regarde ce beau doudou pour toi ! ».

Et elle avait raison ! J’ai quitté le refuge définitivement cette fois, je suis montée dans la voiture du monsieur. Nous avons échangé des regards pleins d’amour. Il y avait aussi énormément de reconnaissance dans le mien.

Je me suis sentie à l’abri du danger, du froid … à l’abri de tout.

Et vous savez quoi ? Eh bien mon papa a tout fait pour retrouver ma sœur Bakou qui me manquait tant.

Mélissa, la gentille dame à qui je mangeais les lacets l’a aidé dans ses recherches.

Oui je l’ai revue, elle a adopté, elle aussi, une créole de Guadeloupe. Elle s’appelle Star, elle est devenue ma copine depuis, ma sœur de cœur, je l’aime beaucoup. 

Nous faisons de belles balades, nous rencontrons d’autres créoles,

Je fais aussi de l’agilité avec elle, même dans son jardin. On s’éclate bien.

Mélissa donc a réussi à organiser une rencontre avec l’adoptante de Bakou.  

Ce jour-là, Papa n’arrêtait pas de me  dire que j’allais revoir ma sœur. J’étais surexcitée, comme sur des ressorts, je ne tenais pas en place. Une vraie puce me disait- il ! Beurk !

Après une demi-heure de voiture, je suis descendue et j’ai de suite aperçu ma sœur bienaimée et elle aussi m’a vue !!

On a tiré sur nos laisses de toutes nos forces. On s’est sauté dessus, on s’est fait plein de léchouilles et de bisous comme au bon vieux temps.

 

Star est alors arrivée.  Eh bien Bakou s’est mise devant moi à vouloir me protéger et me défendre comme si tout ce temps n’avait rien effacé.

Regardez, sur la photo elle s’est mise entre Star et moi.

J’ai compris ce qu’était l’amour d’une sœur !

J’ai compris aussi les paroles des petites fées de Guadeloupe car je connais aussi l’amour de mon papa.

Il ferait tout pour moi, il se priverait de tout pour mon bonheur. Il me laisse dormir avec lui, me fait constamment des câlins. Il ne râle jamais si je veux sortir pour un pipi ou si je lui fais des léchouilles à n’en plus finir.

Et pour finir, vous savez quoi ? Eh bien c’est lui qui me dit : «  Merci de me donner autant d’amour et de bonheur au quotidien, de me faire la fête quand je rentre, je n’échangerais rien de tout cela même contre tout l’or du monde ! »

Si ça ce n’est pas une preuve d’amour !!

Signé, Banjul, une petite créole passée de l'enfer au paradis !

Ecrit par Frédéric et Mabel.